Le Père Goriot c’est l’histoire des habitants de la pension Vauquer. On y trouve évidemment le Père Goriot, vieillard désargenté qui ne vit plus que pour ses deux filles désormais mariées mais aussi Rastignac, jeune étudiant en droit qui arrive tout juste à Paris et ne manque pas d’ambition ou encore le mystérieux Vautrin… Nous allons partir sur leurs traces et voir ce que Balzac leur réserve.
Bonne balade !
Édition utilisée
Lors de ma lecture, j’avais une ancienne édition du Livre de poche mais elle n’est plus distribuée. J’ai donc utilisé une nouvelle édition Folio Classique pour la pagination ci-dessous.
Cartographie des lieux
1. Rue Tournefort
La pension Vauquer est située rue Neuve-Sainte-Geneviève dans le roman. Il s’agit de l’actuelle rue Tournefort.
Madame Vauquer, née de Conflons, est une vieille femme qui, depuis quarante ans, tient à Paris une pension bourgeoise établie rue Neuve-Sainte-Geneviève, entre le quartier latin et le faubourg Saint-Marceau. Cette pension, connue sous le nom de la Maison Vauquer, admet également des hommes et des femmes, des jeunes gens et des vieillards, sans que jamais la médisance ait attaqué les moeurs de ce respectable établissement.
p. 21
2. Rue de Grenelle
Rendez-vous Faubourg Saint-Germain (plus précisément à l’actuelle rue de Grenelle) chez la vicomtesse de Beauséant qui donne un bal.
Rastignac y est invité et il rencontre Anastasie de Restaud.
La comtesse Anastasie de Restaud, grande et bien faite, passait pour avoir l’une des plus jolies tailles de Paris. Figurez-vous de grands yeux noirs, une main magnifique, un pied bien découpé, du feu dans les mouvements, une femme que le marquis de Ronquerolles nommait un cheval de pur sang.
p. 60
3. Rue Cujas
Rastignac croise Anastasie de Restaud le lendemain du bal où il l’a rencontrée. La rue des Grès dans le roman correspond actuellement à une partie de la rue Cujas. Elle commençait place du Panthéon et finissait rue Saint-Jacques.
Eh! bien, ce matin j’ai rencontré cette divine comtesse, sur les neuf heures, à pied, rue des Grès. Oh! le coeur m’a battu, je me figurais…
– Qu’elle venait ici, dit Vautrin en jetant un regard profond à l’étudiant. Elle allait sans doute chez le papa Gobseck, un usurier. Si jamais vous fouillez des coeurs de femmes à Paris, vous y trouverez l’usurier avant l’amant.
p. 73
4. Rue du Helder
Rastignac se rend chez Anastasie de Restaud qui habite rue du Helder.
Le lendemain Rastignac s’habilla fort élégamment, et alla, vers trois heures de l’après-midi, chez madame de Restaud en se livrant pendant la route à ces espérances étourdiement folles qui rendent la vie des jeunes gens si belle d’émotion : ils ne calculent alors ni les obstacles ni les dangers, ils voient en tout le succès, poétisent leur existence par le seul jeu de leur imagination, et se font malheureux ou tristes par le renversement de projets qui ne vivaient encore que dans leurs désirs effrénés; s’ils n’étaient pas ignorants et timides, le monde social serait impossible.
p. 84-85
Au XIXe siècle, les troupes italiennes de Paris changent régulièrement de lieu. En 1815, le théâtre royal italien occupe la salle Favart puis, en 1819, le Louvois. En 1825, les Italiens regagnent la salle Favart sous l’appellation de Théâtre-Italien jusqu’à l’incendie de cette dernière en 1838. Balzac situe le début de l’intrigue du Père Goriot en 1819 mais il en commence la rédaction en 1834. Difficile, donc, de savoir s’il avait à l’esprit la salle Favart, représentation de la troupe italienne à la période où il rédige le roman, ou si son souci d’exactitude aurait dû nous amener au Louvois.
5. Opéra Comique
On suit Rastignac au Théâtre-Italien où il se rend aux côtés de Mme de Beauséant et où il rencontre Delphine de Nuncingen, la soeur d’Anastasie de Restaud.
Madame de Beauséant m’a ordonné de ne pas vous tant regarder. Elle ne sait pas ce qu’il y a d’attrayant à voir vos jolies lèvres rouges, votre teint blanc, vos yeux si doux. Moi aussi, je vous dis des folies, mais laissez-moi les dire.
Rien ne plaît plus aux femmes que de s’entendre débiter ces douces paroles. La plus sévère dévote les écoute, même quand elle ne doit pas y répondre. Après avoir ainsi commencé, Rastignac défila son chapelet d’une voix coquettement sourde; et madame de Nucingen encourageait Eugène par des sourires en regardant de temps en temps de Marsay, qui ne quittait pas la loge de la princesse Galathionne. Rastignac resta près de madame de Nucingen jusqu’au moment où son mari vint la chercher pour l’emmener.
p. 176
6. Jardin du Luxembourg
Rastignac flâne au jardin du Luxembourg où il croise son camarade Bianchon et avec lequel il discute de ses états d’âme.
– Eh! bien, Bianchon, je suis fou, guéris-moi. J’ai deux soeurs qui sont des anges de beauté, de candeur, et je veux qu’elles soient heureuses. Où prendre deux cent mille francs pour leur dot d’ici à cinq ans? Il est, vois-tu, des circonstances dans la vie où il faut jouer gros jeu et ne pas user son bonheur à gagner des sous.
– Mais tu poses la question qui se trouve à l’entrée de la vie pour tout le monde, et tu veux couper le noeud gordien avec l’épée. Pour agir ainsi, mon cher, il faut être Alexandre, sinon l’on va au bagne. Moi, je suis heureux de la petite existence que je me créerai en province, où je succéderai tout bêtement à mon père. Les affections de l’homme se satisfont dans le plus petit cercle aussi pleinement que dans une immense circonférence. […]
– Merci, tu m’as fait du bien, Bianchon! nous serons toujours amis.
p. 187
7. Rue Saint-Lazare
Rastignac est invité à dîner chez madame de Nucingen.
Rastignac arriva rue Saint-Lazare, dans une de ces maisons légères, à colonnes minces, à portiques mesquins, qui constituent le joli à Paris, une véritable maison de banquier, pleine de recherches coûteuses, des stucs, des paliers d’escalier en mosaïque de marbre. Il trouva madame de Nucingen dans un petit salon à peintures italiennes, dont le décor ressemblait à celui des cafés. La baronne était triste. Les efforts qu’elle fit pour cacher son chagrin intéressèrent d’autant plus vivement Eugène qu’il n’y avait rien de joué. Il croyait renre une femme joyeuse par sa présence, et la trouvait au désespoir. Ce désappointement piqua son amour propre.
p. 192
8. Jardin des Plantes
Melle Michonneau et Poiret discutent avec monsieur Gondureau, policier, qui leur révèle ses soupçons au sujet de Vautrin.
Vous entendez monsieur, dans le jugement duquel vous paraissez avoir confiance, repris le faux rentier en s’adressant à mademoiselle Michonneau. Eh! bien, son Excellence a maintenant la certitude la plus complète que le prétendu Vautrin, logé dans la Maison-Vauquer, est un forçat évadé du bagne de Toulon, où il est connu sous le nom de Trompe-la-Mort.
p. 222
La petite rue Sainte-Anne n’existe plus actuellement. Dans le roman, Gondureau indique : venez petite rue Sainte-Anne, au bout de la cour de la Sainte-Chapelle. Dans son Histoire de Paris, depuis le temps des gaulois jusqu’en 1850, Théophile Lavallée écrit : là commençait la rue Saint-Louis, dont les maisons bordaient la rivière et qui se prolongeait jusqu’au pont Saint-Michel c’était par cette rue, qui communiquait par la petite rue Sainte-Anne avec la cour de la Sainte-Chapelle, que les rois se rendaient au Palais. J’en ai déduit que la petite rue Sainte-Anne devait se trouver vers le croisement du quai des Orfèvres et du boulevard du Palais, et le Palais de Justice me paraissait approprié pour illustrer ce passage.
9. Palais de Justice
Mademoiselle Michonneau se rend petite rue Sainte-Anne pour dénoncer Vautrin à la police.
Puis le sobriquet de Vénus du Père-La-Chaise décida mademoiselle Michonneau à livrer le forçat au moment où, confiante en la générosité de Collin, elle calculait s’il ne valait pas mieux le prévenir et le faire évader pendant la nuit. Elle venait de sortir, accompagnée de Poiret, pour aller trouver le fameux chef de la police de sûreté, petite rue Sainte-Anne, croyant encore avoir affaire à un employé supérieur nommé Gondureau.
p. 249
10. Rue d’Artois
Le père Goriot emmène Rastignac au logement que lui a pris madame de Nucingen.
– Mais où me conduisez-vous donc, lui demanda Rastignac.
– Chez vous, dit le père Goriot.
La voiture s’arrêta rue d’Artois. Le bonhomme descendit le premier et jeta dix francs au cocher, avec la prodigalité d’un homme veuf qui, dans le paroxysme de son plaisir, ne prend garde à rien.
– Allons, montons, dit-il à Rastignac, en lui faisant traverser une cour et le conduisant à la porte d’un appartement situé au troisième étage, sur le derrière d’une maison neuve et de belle apparence. Le père Goriot n’eut pas besoin de sonner. Thérèse, la femme de chambre de madame de Nucingen, leur ouvrit la porte. Eugène se vit dans un délicieux appartement de garçon, composé d’une antichambre, d’un petit salon, d’une chambre à coucher et d’un cabinet ayant vue sur un jardin.
p. 276
11. Rue d’Anjou
Rastignac se rend à l’hôtel de Rochefide à la demande de madame de Beauséant pour récupérer sa correspondance avec le marquis d’Ajuda, désormais engagé envers une autre femme.
Rastignac partit, fit demander le marquis d’Ajuda à l’hôtel de Rochefide où il devait passer la soirée, et où il le trouva. Le marquis l’emmena chez lui, remit une boîte à l’étudiant et lui dit : – Elles y sont toutes. Il parut vouloir parler à Eugène, soit pour le questionner sur les événements du bal et sur la vicomtesse, soit pour lui avouer que déjà peut-être il était au désespoir de son mariage, comme il le fut plus tard; mais un éclair d’orgueil brilla dans ses yeux, et il eut le déplorable courage de garder le secret sur ses plus nobles sentiments. – Ne lui dites rien de moi, mon cher Eugène.
p. 331
12. Rue de la Jussienne
Le Père Goriot se remémore la période où il habitait avec ses filles lorsqu’elles étaient encore enfants.
Mon paradis était rue de la Jussienne. Dites donc, si je vais en paradis, je pourrai revenir sur terre en esprit autour d’elles. J’ai entendu dire de ces choses-là. Sont-elles vraies ? Je crois les voir en ce moment telles qu’elles étaient rue de la Jussienne. Elles descendaient le matin. Bonjour papa, disaient-elles. Je les prenais sur mes genoux, je leur faisais mille agaceries, des niches. Elles me caressaient gentiment. Nous déjeunions tous les matins ensemble, nous dînions, enfin j’étais père, je jouissais de mes enfants. Quand elles étaient rue de la Jussienne, elles ne raisonnaient pas, elles ne savaient rien du monde, elles m’aimaient bien? Mon Dieu! pourquoi ne sont-elles pas toujours restées petites ?
p. 340-341
13. Église Saint-Étienne-du-Mont
Le Père Goriot a succombé à ses maux et son enterrement se déroule à l’église Saint-Etienne-du-Mont.
Rastignac et Christophe accompagnèrent seuls, avec deux croque-morts, le char qui menait le pauvre homme à Saint-Etienne-du-Mont, église peu distante de la rue Neuve-Sainte-Geneviève. Arrivé là, le corps fut présenté à une petite chapelle basse et sombre, autour de laquelle l’étudiant chercha vainement les deux filles du père Goriot ou leurs maris. Il fut seul avec Christophe, qui se croyait obligé de rendre les derniers devoirs à un homme qui lui avait fait gagner quelques bon pourboires. En attendant les deux prêtres, l’enfant de choeur et le bedeau, Rastignac serra la main de Christophe, sans pouvoir prononcer une parole.
p. 365-366
Depuis le XIXe siècle, Paris s’est développé et il semble que le point de vue dont profite Rastignac sur tout Paris ne soit désormais plus visible.
14. Cimetière du Père-Lachaise
Le Père Goriot est enterré au cimetière du Père-Lachaise. Le roman se termine sur la scène suivante.
Rastignac, resté seul, fit quelques pas vers le haut du cimetière et vit Paris tortueusement couché le long des deux rives de la Seine, où commençaient à briller les lumières. Ses yeux s’attachèrent presque avidemment entre la colonne de la place Vendôme et le dôme des Invalides, là où vivait ce beau monde dans lequel il avait voulu pénétrer. Il lança sur cette ruche bourdonnant un regard qui semblait par avance en pomper le miel, et dit ces mots grandioses :
– A nous deux maintenant!
p. 367